Les fusillés de la Première Guerre Mondiale…
Les fusillés de la 1ère Guerre Mondiale font encore couler beaucoup d'encre aujourd'hui. 100 années sont passées, les laissant quasiment dans l'anonymat le plus complet. Le centenaire a réveillé les politiques mais qu'en est-il réellement de ces fusillés ?
En m'attachant à ces dossiers de fusillés, je ne m'attache pas à du voyeurisme mais bien au fait de remettre les faits à leur place, dans le contexte de l'époque. Même, si, souvent, à la lecture de certains dossiers, je trouve que des circonstances atténuantes peuvent être considérées (je suis en 2017), je retiens que le Code de Justice militaire de l'époque était ce qu'il était. C'est avec ce code-là que les soldats, sous-officiers, civils, ont été jugés.
J'avais imaginé rencontrer un juge et un avocat et leur demander la possibilité de rejuger, aujourd'hui tous ces fusillés. Mais, après réflexion, je me rends bien compte que c'est de l'ordre de l'impossible. Une raison est que les jugements ne seraient rendus que sur pièces, c'est-à-dire hors la présence des accusés, et pour cause… Comment donc pouvoir imaginer le comportement de l'accusé, comment pouvoir sentir ou ressentir s'il est sincère ou s'il joue une comédie, s'il est franc ou menteur, s'il a des problèmes psychologiques ou non… ? Bref, impossible de "revivre" les évènements.
Autre raison, importante aussi, c'est que nous réagissons humainement, avec notre cœur et dans un contexte historique totalement différent. Les règles et conditions de vie ont changé. La société et les mœurs ont évolué.
A chaque lecture, à chaque dossier où le soldat a "abandonné son poste devant l'ennemi" je me dis "pauvre homme". Oui, pauvre homme car quelles que soient les raisons de cet abandon, je n'envisage pas de pouvoir prendre leur place. Je fais un simple constat et, même si je trouve la décision final, "condamné à mort", je me raccroche au fait que c'était la loi de l'époque.
Parfois, j'essaie de m'imaginer vivant en 1914… Qu'aurais-je pensé de ce soldat qui abandonnait son poste alors que mon mari, mon frère ou mon fils aurait perdu la vie, lui, dans les tranchées. Que mon parent aurait perdu la vie en "faisant son devoir de bon français" ? J'aurais peut-être trouvé "normal" que celui qui fuit soit passé par les armes !
Et puis, je pense aussi aux familles. Oui, les familles de ces fusillés étaient perçues comment dans le village ? Pour, certaines, elles étaient sûrement montrées du doigt, les mauvaises langues devaient aller bon train… La honte, le déshonneur était jeté sur la famille !
Et cet homme qui est revenu alors que son frère ou son cousin a abandonné son poste et, donc, a été fusillé ? Comment a-t-il réagi face à cette branche de famille ?... Difficile à imaginer ! Autant se taire ! Ce que beaucoup de soldats ont fait : très peu ont raconté la vie dans les tranchées, très peu ont parlé de "leur" guerre. Mais, même s'ils ne disaient pas, ils pensaient, ils ont vécu avec ces images de tranchées, ces morts, ces fusillades, ces abandons, ils ont vécu cela tout le reste de leur vie…
Il est un fait certain, aujourd'hui, c'est que nous ne pouvons parler que des fusillés qui ont eu un jugement. Comment pouvons-nous parler de ceux qui ont été "lâchement" abattus dans un pré, sans jugement, pour avoir osé abandonner leur poste ?... D'autant que, parmi eux, certains ont été déclarés Morts au combat, cela permettait, aux officiers ayant donné les ordres, de camoufler ce manque de jugement !
Là, je ne vous parle que de ces soldats qui ont "abandonné leur poste devant l'ennemi". Jusqu'à présent, je leur trouve souvent des excuses. Mais, ceux qui ont trahi ?
Ceux qui ont joué avec l'espionnage en donnant des renseignements à l'ennemi ? Devons-nous pardonner aussi aujourd'hui ? Je pense que non ! Et en lisant et publiant sur ces personnes-là, j'équilibre le fait que tous les fusillés ne l'ont pas été "inutilement" ou "injustement"…
Alors, rejuger tous les jugements est impossible : faute de temps, faute d'argent, faute de règles… Ils ne seraient pas plus objectifs qu'ils ne l'ont été pendant la guerre…