Challenge AZ : X… comme X, l'inconnu !

Ah, ce père inconnu ou non dénommé… Combien de fois le trouvons-nous dans nos généalogies ? En a-t-il toujours été ainsi ? Et qui est-il ?...

La grossesse jusqu'au XIXème siècle

Peut-être qu'au Moyen-Âge, les gens se souciaient peu du cas des enfants qui étaient décédés, volontairement ou non, lors de l'accouchement d'une femme seule. C'est ainsi qu'Henri II, en février 1556, pris les dispositions contre les femmes, les veuves et les filles ayant conçu leur enfants par moyens deshonnêtes, et dont l'enfant viendrait à périr lors de l'accouchement seront passibles de la peine de mort. Une évolution importante suivra : la déclaration du nom du séducteur et aussi de la perception d'une provision pour soins à l'enfant. Il est assez courant de constater que le séducteur dénoncé dans les registres paroissiaux, s'il était célibataire, épousait très vite la maman…

Louis XIV reprend l'Edit en 1708 et ordonne, en plus, que le rappel de l'Edit d'Henri II soit fait tous les trimestres aux prônes de la messe par les curés et les vicaires. Les mesures contre les femmes seules enfant restent les mêmes. C'est ainsi que le 14 janvier 1753, à Romorantin, Maire LOUBEREAU, dix-sept ans, fille de Silvain LOUBEREAU, déclara avoir été séduite, sous promesse de mariage, par Jacques LEMIER, domestique de son père, qu'elle est "grosse" de cinq mois dudit Jacques LEMIER et, enfin, qu'elle n'a fait "commerce charnel" avec aucun autre homme.

Au XIXème siècle, l'Edit de 1556 étant loin et tombé en désuétude, il est encore possible de trouver des déclarations de grossesse dans les rapports de la Justice de Paix. Depuis le XXème siècle et de nos jours, bien entendu, ces déclarations n'existent plus. Elles ne le sont que pour la prise en charge médicale et légale de la grossesse.

Après la naissance…

Voilà, l'enfant est né. Si la mère a été épousée, pas de souci : l'enfant a un père et le reconnaît comme tel. Mais, lorsque la mère reste seule pour assurer l'éducation de son enfant ? J'ai relevé dans des actes paroissiaux de la Creuse le terme "bâtard" lorsque l'enfant était né sans père dénommé. Le terme est rude, mais je me rappelle encore l'avoir entendu enfant !... L'enfant qualifié de cet adjectif était tout de suite catalogué : pas besoin d'explication pour comprendre qu'il n'avait pas de père… Que se passait-il lorsqu'il était seul avec sa mère ?... Nul ne le sait, ou alors l'information n'a pas suivi. Sinon, nous pourrions compléter nos arbres généalogiques. L'enfant voulait-il savoir ? La mère, voulait-elle donner le nom du père ?...

Les recherches généalogiques

Je n'aime pas lire le terme "père inconnu", je préfère "père non dénommé", mais comme ce n'est pas moi qui rédige les actes, je fais avec ce que je lis ! Mon arrière-grand-mère maternelle, Marie Victoire Georgina DAVID n'a pas eu de papa nommé. Elle est née le 20 avril 1872 à Vailly-sur-Aisne, fille de Suzanne Augustine Hortense, 27 ans, manouvrière. Le 31 décembre 1873, elle est présente au mariage de sa maman avec Charlemagne DEVIENNE, 40 ans, domestique de labour. Ce dernier est veuf de Augustine Hortense MARCHAND, décédée le 26 novembre de la même année. Il est père de cinq enfants : Charles Edmond, 14 ans, Bénoni Joseph, 12 ans, Charles Léon, 9 ans, Jules Charles, 7 ans, et Charles Augustin, 2 ans.

De mon point de vue, même si cela se faisait beaucoup à l'époque, je trouve la noce un peu rapide… Quatre enfants du remariage de Charlemagne naissent tous à Vailly :

• Charles Victor, le 21 octobre 1874,
• Charles Georges, le 24 novembre 1876,
• Georges Adrien, le 31 janvier 1879,
• Charlotte Florentine, le 28 mars 1884.

Revenons donc à mon arrière-grand-mère… Le 16 août 1890, elle a épousé Alexandre Francisse MENOT, 32 ans, manouvrier. Elle mettra au monde huit enfants, dont 6 garçons et deux filles. Elle est décédée le 14 mars 1955 après avoir eu le bonheur de connaître 12 petits-enfants et 9 arrière-petits-enfants. Pas moi !...

Je me suis toujours demandé si, un jour, elle avait demandé à sa mère qui était son père. Si oui, était-ce Charlemagne ? Cela pourrait, car, marié, il ne pouvait pas reconnaître l'enfant d'une autre femme. Charlemagne est décédé en 1897, Suzanne, en 1912. La Première Guerre Mondiale a fait voler en éclat ou partir en fumée les archives… Aucun document pour savoir si Marie Victoire Georgina avait pu, éventuellement, hérité de celui que je pense être son père !

Aujourd'hui, nous pensons toujours à l'enfant qui est à la recherche d'un père. Et la mère ? Comment vit-elle cette situation ? Comment et quand peut-elle dire à son enfant pourquoi il n'a pas de "père" à l'état civil ni à la maison ? Est-il possible de cacher cette information importante ? Comment et pourquoi garder ce "secret" qui partira dans la tombe ?

Je me pose souvent la question du cas de conscience de la mère : ressent-elle comme une faute cette naissance sans papa au chevet du berceau ?... Aujourd'hui, les enfants posent beaucoup de questions, ils osent plus, mais les générations précédentes étaient moins curieuses ou n'osaient pas…

Comments

[Antequam]

Merci...

[Sébastien | Marq]

On a souvent ces situations dans nos généalogies. J'aime beaucoup le terme de père "non dénommé" en tout cas.